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             PRIMO - LE MAGICHIEN !

 

En cynophilie, comme dans beaucoup de métier, il y a ceux qui tâtonnent, qui tentent, qui voudraient bien, qui réussissent… Et puis, il y a ceux qui savent ! Dans cette caste élitiste, nous trouvons le top du summum « ceux qui ont fait ». Je me rappellerai toute ma vie, la première fois que j’ai vu Monsieur Orlandini à l’œuvre et je ne pense pas que des mots puissent qualifier ma réelle stupéfaction. Son parcours était d’une telle pureté, d’un tel savoir-faire, que je n’avais qu’une envie : Rentrer à la maison pour « entraîner », voire « essayer » de l’imiter. Sa démarche si particulière, ses mises en place sans chichi et ses ordres mélangeant malices & assurances m’avaient estourbi. Cet homme avait un Don ? Oui assurément, car en visualisant ses performances, on notait que son Johnny exécutait chaque exercice en le regardant, le fouet battant, détendu et prêt à n’importe quelle mission. Bon sang, j’avais devant moi, sans nul doute, l’homme chien de toute une génération. Néanmoins, pétrifié face à autant de talent, je n’ai jamais osé l’aborder. Ce n’est que bien plus tard accompagné d’Alain Savignat que je fus présenté au Magicien. C’est bien simple, j’étais tellement ému qu’un seul & unique « bon…jour » sortira péniblement. D’entrée de jeu, les 2 hommes entamèrent une discussion sur l’évolution du Ring en allant jusqu’à décortiquer les différences réactives sur une fuite entre un BA de bonnes souches et un « Rusky-Flap »… quant à moi, totalement hypnotisé, j’écoutais religieusement sans broncher. De plus, chaque mots, termes ou situations étaient pesés de sens, mais c’est surtout l’interprétation de Mr Orlandini sur l’élaboration de la conduite de recherche qui claqua dans mon cerveau et certainement dans celui d’Alain, puisque nos 2 titans vont débattre sur l’exercice pendant une demi-heure, tout y passe : blocage, fuite, vigilance, prises rapides, instinctives, j’en passe et des meilleurs. Ils iront même jusqu’à délibérer sur le fondement des races les plus adaptées à ce type d’exercice. La leçon fut comment dire ? Intemporelle, inoubliable, fulgurante, fracassante, je ne sais pas, je ne sais plus… En fait, il m’aurait fallu un caméscope (pas légion à l’époque) pour apporter une preuve de la vie extra terrestre !    

 

G-P comme GREAT PRIMO !

 

Valeur iconique dans un monde en perpétuel mouvement, Monsieur Orlandini fut et restera un Maître Dresseur exceptionnel. Mieux : il n’aura de cesse que de dominer la planète cyno et cela jusque dans ses moindres recoins. Il va pourtant se spécialiser dans le Ring et comme chacun sait : ses innombrables succès vont rapidement créer la légende !

 

En, effet, l’homme n’est pas habile, mais hors normes, d’ailleurs au jour d’aujourd’hui, peu de cynophiles peuvent prétendre approcher ses prouesses et nombres de Ringueurs, Freestylers & Eleveurs toutes races lui vouent un culte. D’ailleurs, au vu d’un itinéraire sans faute, comment pourrait-il en être autrement ? Il dressera, prouvera et conduira une multitude de races « mâle comme femelle » au plus haut niveau. Les grands anciens se rappellent de King Vom Doll son BA avec lequel, il a tout gagné. Puis Quai de la Source St Héléne, Sick le Beauceron, Ina Von Bruhmwald, Oro de la Fontaine du Buis, toute la dynastie des Johnny’s, des Jacky’s et bien plus encore… Ses aventures sont clairement narrées par ses amis, qui ne tarissent pas d’éloges sur son étonnante vivacité d’esprit et sur un sens de « l’anticipation » proche de l’irrationnel. Certes, qui aurait pu dompter *Chéribibi ? Qui aurait pu, en quelques mois, amené en Ring 3, un monstre comme *Cé ? Qui aurait pu débouler en finale avec un Malinois de 14 mois ? Qui aurait pu la remporter dans la foulée ? Qui peut se prévaloir de posséder autant de Coupe que le Real, l’OM et Manchester au mieux de leurs formes ? Fidèle en cyno et fidèle en ses convictions, il sera également « avant-gardiste » en Pistage, RCI, Campagne et bien entendu précurseur en Mondioring. Sans oublier ses voyages où il expliquera notre discipline à qui veut savoir en démontrant, puis en expliquant une foule de tactiques et de l’avis de tous, il reste l’un des meilleurs techniciens « de la garde d’objet » au monde ! Ajoutez à cela, un caractère puissant, un sens de l’humour détonnant et une volonté de fer. Certes, un homme de cette envergure est plutôt rare, de ce fait : un comité d’experts proposera de lui rendre hommage de la plus belle des façons qu’il soit : Avec « un Grand Prix » honoré par son nom.

 

JOHNNY EU L’IDEE !

 

 En parlant de nom, voici comment ne pas se tromper : c’est simple, il suffit d’appeler tous ses chiens par le même, « Johnny » ! Croyez-moi, la méthode a fait ses preuves (et pas mal de petit…). Vous l’aurez compris, l’homme est perspicace et d’une intelligence affûtée. Sur ce sujet, je vous invite à lire l’un de ses portraits écrit en 1987 par Mr Gérard Cresteil dans le Sans Laisse de Décembre N°7, l’auteur nous explique comment son premier contact à l’orée d’un Club fut saisi. En voici un court extrait : Primo Orlandini arriva tranquillement avec « son pote le chien ». Celui-ci grimpa d’une traite en haut d’un portique, se bloqua, restitua des positions, redescendit et remonta en marche arrière…

 

D’emblée ça calme, mais la démonstration ne s’arrêta pas en si bon chemin, car ce genre de prouesse pour un passionné (de cette envergure) n’étant qu’une base. En effet, son Malinois (déjà) sautait des écluses de 7 mètres ou escaladait des murs infranchissables, le tout en obéissant à la perfection. Du mordant ? Oui aussi, avec ses propres protections et autres diableries dont il a le secret. Un secret que quelques adeptes ont eu le privilège de partager, mais faut-il dévoiler « le mystère de la malle des Indes » ? Un professionnel doit-il expliquer ses tours ? Pas forcément, bien souvent : Il suffit de regarder et quand on voit ce Monsieur pratiquer, il n’y a pas que le chien de hum… magnétisé ! D’où son surnom de magicien* et, certes d’Houdini à Orlandini : on pourrait presque se tromper. Vous l’aurez compris, l’homme est habité et à l’heure ou beaucoup de ses compatriotes seraient plus enclins à mater l’inspecteur Derrick en sirotant une verveine. Primo Orlandini démontrait encore son immense talent en enflammant les foules. De mon côté, je le croisais souvent et nous bavardions (devinez de quelle race ?) parfois longuement, mais vous connaissez mon enthousiasme et je ne voulais pas abuser. Néanmoins, je souhaitais vraiment interviewer ce grand Monsieur (objectif particulièrement difficile à atteindre). Il m’aura fallu être très patient, mais vous connaissez le dicton et, c’est en ce week-end bénit « des 24 heures du Cyno» que j’ai tenté ma chance. En ce bel après-midi, il honora le green de sa présence et en un éclair, sa prestation fut au-delà de toute espérance : les jeunes voulaient être avec lui sur les photos, lui serrer la main, lui parler, bref : il sortira du terrain sous un tonnerre d’applaudissement avec svp…  une  standing ovation qui rappelait au plus chevronné d’entre nous, qui c’est le patron !

 

Quant à votre serviteur « estomaqué » comme au premier jour. Il ne pouvait qu’espérer, quelques mots de son idole, puis… un autre géant en la personne de Jean Jacques Baltzinger allait exaucer ce vieux rêve et chers amis, cet instant magique, j’aimerais le partager avec vous. Alors imaginez une rencontre mixant Ring, RCI & Mondio : en plein été, noire de mondes, des Fans déchaînés, des chiens partout, une sono aux taquets et au fond de ce complexe, un petit coin restauration. Je lève la main en signe amical et c’est avec une gentillesse peu commune que Primo m’invite à sa table.

 

Aux Cynophiles… Des ANS !

 

Cher Monsieur, je suis particulièrement heureux d’être avec vous et lors d’une discussion avec Jean-Jacques, je l’interpellais sur la durée de votre carrière ?

-          (Il réfléchit un court instant, puis) Oh, un peu plus d’un demi-siècle. Puisque j’ai commencé la cynophilie en 1946, après la guerre.

Autant de finale ?

-          (rire immédiat…) Non quand même pas, mais c’est vrai que toutes « Ring & Campagne » mises bout à bout, il y en a beaucoup.

(Scoop, je vais peut être tordre le coup à une fable, 1,2,3 partez ) Votre cœur et Ringueur ou plutôt Campagnard ?

-          En fait, mon cœur à 3 tiers, j’aime évidemment le Ring, mais également le Mondioring & le Campagne. Du fait, j’aime toutes les disciplines, mais je reconnais que le Ring est plus facile d’accès. Pour faire du Campagne, il faut souvent aller très loin, voyager, etc… et ce n’est plus de mon âge.

C’est vrai que vous êtes à la base du Mondioring ?

-          Oui, ça c’est fait à Tournai avec tous les grands cynophiles de l’époque. Nous avions envisagé un bon programme, qui a fait ses preuves depuis.

Et aujourd’hui vous le trouvez comment ?

-          Assez bien, ce n’est pas un programme parfait, mais il varie tout le temps. Cette notion est intéressante et puis, ça change du Ring. Il y a une ressemblance lointaine avec le Campagne, j’en ai fait d’ailleurs pour me rendre compte des diverses difficultés.

Effectivement, je vous ai vu en Mondioring, mais vous avez pratiqué une foule de disciplines je suppose ?

-          A peu près toutes, j’ai même fait un peu d’Obéissance avant de critiquer (rires), j’ai fait du RCI, du Pistage, je suis ouvert par nature et j’aime profondément la cynophilie. Bien sûr, il y a des nouvelles que je ne connais pas, mais dans l’ensemble : des chiens truffiers au Ring, ça m’intéresse…

Je vous renvoie ce compliment sur votre dextérité avec n’importe quelle race ?

-          Oh non, pas toutes. Je dirais plus modestement celles qui sont aptes à travailler pour la compétition, Berger Allemand, Beauceron, Doberman, Berger Belge, etc…

D’ailleurs, les Cynos de ma génération se rappellent évidemment de Jonny le Champion ?

-          C’était un très grand chien, il gagnait 2 concours par jour, car à l’époque, nous avions le droit et étrangement, il était toujours meilleur au deuxième. Ce détail me chagrinait, j’en avais parlé à mon vétérinaire, qui m’expliqua une théorie relative aux chevaux. C’était étonnant, car il y avait effectivement un changement. Aujourd’hui malheureusement nous ne pouvons plus analyser cela.

Peu de Cynos le savent, mais vous avez été l’un des premiers (en France) à travailler des Malinois, mais je vous sais très attaché au Berger Allemand ?

-          Mon premier chien était effectivement un Malinois, mon second était un BA. Grâce à lui, j’ai remporté le titre 4 fois consécutivement. Pourtant, il a été pris « tard » au dressage, puisqu’il avait quatre ans et demi, mais il était de bonne condition. C’est bien simple, je stoppai sa carrière à 10 ans. J’aurai même pu gagner la 5ème fois, mais la jeunesse rend parfois orgueilleux et comme j’étais talonné de très près par un Alsacien (Mr Bolchert me semble t-il), je ne voulais pas perdre, donc ma décision fut sans appel. Néanmoins, à ma stupéfaction, est ce due au stress ou à l’émotion, mon principal rival ne terminera pas dans le peloton de tête… Ah, tu peux me croire, je l’ai regretté cette décision (éclat de rires) !

Vous arrivez à dresser un chien de n’importe quel âge et vous êtes réputé pour placer des chiens au top niveau et cela dès leur plus jeune âge. Nous avons tous en mémoire l’autre Jony (Du comte de Ribeaupière)?

-          Jony était prêt à 12 mois pour le championnat, il sera en finale à 14.  J’ai eu des chiens qui à 5 mois avait assimilé l’ensemble du programme, sauf les hauteurs évidemment… A titre d’expérience et dans le respect du chien, j’ai toujours poussé l’apprentissage.

Vous avez élevé aussi ?

-          Très peu, sous l’affixe du King de Lorraine.

Quels sont les atouts du Malinois à l’heure actuelle et comment expliquez-vous sa suprématie ?

-          Pour le Malinois, je dirai que les éleveurs ont un grand mérite, car ils ont beaucoup sélectionné. Je rajouterai qu’aujourd’hui, le Malinois n’a qu’un problème : Il a une carrosserie pas assez solide pour palier à sa vitesse et à son mordant ! Nous voyons apparaître des ennuies de vertèbre, d’épaule, de boiterie qui n’existaient pas avant. C’est dommage, tant ce chien fut sélectionné avec un soin particulier. Autrement, que dire, si ce n’est qu’il est le chien de compétition top niveau.

On se remémore les bases : Urgo, Vass, Quacha ?

-          Oh oui, ils étaient extraordinaires et ils n’avaient rien à envier à ceux d’aujourd’hui. D’ailleurs Donath (propriétaire d’Urgo de Turenfels) était un dresseur fabuleux, j’éprouve beaucoup de respect pour ce Monsieur. C’est de mon avis, l’un des meilleurs avec pas toujours un caractère facile, mais quel Dresseur !

Vous êtes resté fidèle au Berger Belge avec aujourd’hui un Tervur ?

-          En fait, j’avais envie de reprendre un Beauceron, mais ce type de chien demande une santé de fer (large sourire)… J’aime beaucoup les Beaucerons, on n’en avait amené 2 au championnat de France, ce fut une belle expérience.

Et puis vous avez travaillé Cé ?

-          C’est exact, il a donné « le sang partout »* et nous l’avons fait connaître. J’en suis heureux, car c’est un excellent chien dans le sens global du terme.

Qui dit global, dit évidement sport canin et nous aimerions connaître votre avis sur l’évolution du Ring ?

-          Il a énormément évolué, mais il n’est pas vraiment plus dur dans sa réalisation. Je m’explique, avant nous avions les fausses fuyantes, les protections muselées et bien d’autres choses. C’était difficile, car si on loupait cette fausse fuyante par exemple : on ne pouvait pas faire « une quantité de points » comme aujourd’hui, puisqu’elle n’existe plus (celle-ci était bien rétribuée). Alors ça se discute… Sinon, hors mis les conduites, le Ring est un bon programme.

Vous parlez de l’escorte ?

-          L’escorte de l’HA me déplait actuellement, nous allons trop loin et je trouve que ce ne sont plus des conduites. A notre époque, nous appelions cela « la conduite du prisonnier », de ce fait : on ne se retourne pas, on ne lasse pas ses chaussures, on ne fait pas volte face, on ne met pas la main, etc… Alors, j’entends « ça ne fait pas de mal au chien », c’est vrai, mais ça fait très mal à la feuille de pointage (éclat de rires) !

Et puis, ça gratifie les coups de dents ?

-          Oui en plus, mais il manque surtout un respect du règlement. Certains juges sont trop tolérants sur la conduite et c’est au dresseur de palier « les éventualités ». Si l’on prend à témoin, le parcours des 24 heures : Il est correct et d’un excellent niveau.

On a du vous le dire 100 fois : Nous sommes très heureux de vous compter parmi nous. De plus, vous nous avez offert une superbe démonstration ?

-          Et bien merci, j’avais promis à Jean-Jacques que je serai là et c’est une magnifique rencontre. Le cadre est superbe, le temps idéal et l’ensemble agrémenté d’une organisation sans faille.

Ça va faire plaisir aux organisateurs, car ils aimeraient apporter d’autres disciplines et J-J me parlait du Campagne. Quel est votre avis sur cette discipline ?

 - Je trouve cette discipline vraiment intéressante. Qui plus est, à contrario du Ring, elle n’a pas évolué tant que ça…  

 

LES TEMPS HEROÏQUES !

 

Avec votre permission, pourrions-nous aborder un aspect plus « politique » de nos sports et qui dit politique dit juridique. Quelle est votre opinion sur les chamboulements « obligatoire » type CSAU, Licence etc… ?

-          Pour être totalement franc, je ne sais pas si le CSAU à une grande valeur. Les anecdotes ne manquent pas sur la contradiction de cette formule. Dans le cas ou un chien serait rebelle ou particulièrement vif de caractère, c’est au Maître de gérer ce problème et c’est toujours au Maître de prouver qu’il a le contrôle que se soit sur un terrain ou ailleurs.

En parlant de chien au caractère « spécial » vous en avez eu de coriace, dont Un… comment dire, hors Norme ?

-          Je pense que tu parles de Chéribibi*, oui en effet, il n’était pas facile. C’est marrant que tu l’évoques car, je viens de voir un Berger Belge qui devrait avoir un courant de sang similaire, c’est celui de Marc.

Vous parlez de Us’Ton à Marc Vilain ?

-          Oui, par ailleurs, ce Monsieur est un excellent dresseur et lorsque j’ai vu son chien, ma première réflexion fut : « il a du Faubourg des Postes » dans ses origines. Chéribibi avait ce type de construction et pour répondre à ta question : oui, il n’était vraiment pas facile. Il n’abandonnait jamais, pourtant, c’était un Malinois qui s’essoufflait beaucoup, mais il allait quand même jusqu’au bout… Il ne calait jamais !

Nous n’avons plus de Malinois comme ça ?

-          Oh non, ils sont nettement plus souples. Le caractère a considérablement évolué, aujourd’hui « l’ensemble » des Malinois profite d’un caractère stable.

Comment avez-vous fait pour l’amadouer ?

-          Cela n’a pas été simple, il fallait faire attention et surtout savoir s’y prendre. Il avait expédié son premier propriétaire à l’hôpital et avec ce genre de carte de visite, il faut être constamment sur ses gardes.

Alain Savignat m’avait raconté cette anecdote ?

-          Ah oui ? C’est vrai qu’il aimait beaucoup ce chien.

Vous l’avez malgré tout amené à haut niveau ?

-          Il a fait les sélectifs, mais sans aller au championnat de France. Ce qui m’a considérablement aidé, c’est qu’il ne me détestait pas (rires)… Bon, il ne fallait pas le corriger pour « un oui ou un non ». Il fallait vraiment qu’il fasse la faute, s’il était pris sur le fait, il acceptait la remontrance. Par contre, s’il doutait de ta bonne foi : il te fixait droit dans les yeux « avec ses yeux ronds comme des billes », il grognait immédiatement et là, il fallait tout de suite le tempérer.

Léon Destailleur m’avait également parlé de Mulot, il l’analysait en vindicatif aigrit ?

-          C’est une bonne formule, fort heureusement, il était moins puissant que Chéribibi. Vicky n’était qu’un bloc et d’une carrure imposante. Tu sais, que j’ai eu son frère à Mulot ? Un bon chien, pas facile non plus. C’était les Malinois d’une époque et là… il n’était pas question de parler de CSAU (sourire).

Ce qui est étonnant quand on vous observe sur un parcours, c’est votre conduite si tranquille malgré des chiens au caractère et aux aptitudes parfois opposées. Aujourd’hui encore, quelle démonstration ?

-          La raison est simple : je n’aime pas dresser à la militaire, j’aime que cela soit naturel. Attention, c’est beau de voir les militaires, mais ce n’est pas mon genre. J’aime qu’il soit à coté de moi « gentiment », en plus : Le chien que je viens de conduire n’est pas à moi (à ce moment, je reste stupéfait…Ma main au feu, qu’il était à lui, tant la complicité est énorme) Ce n’est pas votre chien ?

-          Non non, je viens de le prendre pour le concours. C’est le frère du mien qui a eu subitement des problèmes de lombaire.

Bon sang, il était parfaitement en symbiose, mais au fait : Comment êtes-vous venu en cynophilie et ; qu’est ce qui vous a passionné dans le métier du chien ?

-          Je le suis depuis toujours, c’est une passion naturelle.

On vous cite en référence et on imagine qu’un homme comme vous a du en voir de toutes les couleurs. Alors comment tout à commencé ?

-          Déjà pendant la guerre, j’ai eu des moments « privilégié » avec un Berger Allemand. J’étais un passeur, je faisais passer les prisonniers et j’étais affiché à la frontière de Moyeuvre. Comme j’habitais de l’autre coté, je me rendais à proximité et malgré mes faux papiers, ils m’ont reconnu. Aussitôt, je fus arrêté et en très peu de temps, je me suis évadé. J’avais réussi à casser une fenêtre et je m’enfuyais sans demander mon reste. Malheureusement, un soldat m’a vu et immédiatement, il m’a envoyé leur Berger Allemand. Heureusement pour moi, ils ont mis du temps à le détacher et j’avais donc, de l’avance. Tandis que je courais dans le bois, je le sentais se rapprocher, soudain : Je me retourne et il était tout près. Inquiet, je me jette au sol et par l’émotion, je me suis mis à vomir. Puis, dans la précipitation, je récupère un bâton, je lui lance et voilà qu’il revient avec et bien décidé à manger tout ce que j’avais vomi. Après, il m’a suivi jusqu’à la frontière, nous avons fait un bout de chemin ensemble et il n’a plus voulu me quitter.

Vous l’avez gardé ?

-          Hé non, je ne pouvais pas à cause du tatouage, mais il m’a accompagné un moment. J’ai tenté de le donner à des commerçants, qui eux aussi ont hésité en voyant le tatouage. Alors, je l’ai ramené à la douane. En cachette, je l’ai attaché à un poteau avec une grande ficelle et je me suis sauvé. Je l’aurais bien gardé, mais cela aurait été vraiment risqué et puis, il fallait le nourrir pendant la guerre…

Comment êtes-vous arrivé en cynophilie, comment dire… plus traditionnelle ?

-          J’avais vu une compétition en Moselle, ça m’avait enthousiasmé au plus haut point. J’avais également vu des chiens de cirque et je reproduisais les exercices à mon idée. Je m’amusais beaucoup à travailler ce genre de numéro. Quand je regardais un chien travailler, je savais comment faire pour que le mien réussisse immédiatement. J’ai la chance de n’être jamais à court d’idées dans le dressage.

Et le costume ?

-          Je l’ai porté pour mes chiens, mais jamais en compétition. J’aimais bien régler mes problèmes « moi-même », ça m’a permis d’avancer rapidement.

Vos théories me rappellent quelqu’un, vous êtes amis avec François Lelevier* ?

-          Oui, d’ailleurs nous avions une collaboration saine. Il venait chez nous, on s’entraînait ensemble et personne n’avait rien n’à cacher.

Il parle de vous comme un expert de la garde d’objet. D’ailleurs, on vous surnomme toujours le Roi de la valise ?

-          C’est venu du fait, que j’ai eu l’idée de placer le chien « les pattes dans l’objet ».

Ah, c’est à vous que l’on doit ça ?

-          J’ai eu cette idée et de nombreux dresseurs ont approuvé (rires…), mais attention, j’ai eu aussi quelques déboires, surtout quand on mettait les chiens trop tôt. J’ai fait comme tout le monde, il m’est arrivé d’avoir des mauvaises notes. La valise est un exercice particulièrement difficile, il faut être persévérant !

Vous avez une tactique précise selon la race ?

-          Non, il faut juste « le bon chien » avec des « bonnes aptitudes », c’est comme tout. Après, au niveau du travail, je vais immédiatement savoir si je peux aller au championnat. Dans le cas contraire, je vais tirer tous ce que je peux. Ce n’est qu’une fois qu’il est aux taquets que je suis content et d’autant plus, si championnat il y a. J’adore régler les problèmes, ma plus grande passion est là, il faut systématiquement que je règle les problèmes et quand je trouve la solution, je suis satisfait.

Vous retiendrez combien de grands chiens dans votre parcours ?

-          En fait, ça dépend de la discipline. J’ai eu des chiens en Pistage qui faisaient de la « réalité », ils cherchaient des gens disparus et ils m’ont profondément marqué. Il y a eu le Jony*, le King et bien d’autres. J’en ai eu tellement…. (il réfléchit), Jony à 135 concours avec une moyenne extraordinaire.

Quand on parle de Jony, il est clair que vous en avez eu plusieurs. On évoque souvent Johnny le poilu ?

-          Il s’agit de Johnny de la Fecht, qui fut également sélectionné pour le Championnat. Malheureusement, il ne supportait pas la chaleur, j’ai donc fait avec Jony & Johnny : L’ouverture et la fermeture... (C’était en 1976 à Blagnac). Je me souviens, qu’il ne faisait pas loin de 35°, Jony le poil court a gagné la coupe et le poil long fut dernier. Je ne sais pas si quelqu’un, c’est un jour retrouvé dans ce constat ?

Pourtant, beaucoup l’indique comme une pointure ce poil long ?

-          C’était un bon chien, c’est vrai. Mais, j’ai vu mieux : Vico à Sengelin par exemple. Urgo & Rusky également 3 sacrés Malinois.

Et Xjellaba ?

-          Ah oui aussi, il m’intéressait d’ailleurs, mais c’est François (Lelevier) qui l’a racheté. De mon coté, j’ai récupéré Johnny le poilu et ce jour là, j’ai appris qu’il ne fallait jamais acheter un chien en hivers (rires)…

Quel carrière ce Xjellaba ?

-          Superbe avec plusieurs finales à la clé, Ring comme Campagne.

Vous êtes toujours autant sollicité pour des leçons et autre conseil ?

- Je travaille toujours derrière chez moi eh oui, j’arrive à régler des petits problèmes « par-ci, par-là ». Maintenant, les gens savent dresser. Comme nous l’expliquions tout à l’heure, le fait de l’évolution caractérielle de nos chiens a ouvert des perspectives. La plupart ont appris à dresser et puis, les conducteurs ont retenu, je dis bravo à cela.

Vous avez été à la finale cette année ?

-          J’ai fait l’effort et je n’ai pas regretté, car c’était parfait. Je n’ai pas participé, mais je suis venu les applaudir nos champions et quels champions !

 

Comme vous le constatez, la passion s’avère intacte. De mon coté, je ne saurais vous décrire, le plaisir, l’honneur et la joie d’avoir pu croiser et disserter en tête-à-tête avec un tel homme. Je le revoie encore saluant la foule presque gêné par tant d’honneur et, c’est en cette fin de soirée que nous nous sommes séparés. Lui serein et moi en étant persuadé d’avoir croisé un géant, parce que : Primo) cet homme est magique et secundo), allez oublions, le secundo : Il n’y aura désormais que l’empreinte de Primo qui comptera à tout jamais.

Chers amis, le Magicien vient de partir en nous laissant un fier héritage. Celui d’un virus, plus communément appelé « passion dévorante » qui coule désormais dans chacune des veines de tous cynophiles et ça… c’est peut-être sa plus belle victoire !

 

Glossaire : *

Chéribibi : Alias Vicky du Faubourg des Postes, Malinois au caractère épouvantable, d’une rudesse phénoménale et particulièrement rebelle.

Cé de la Cité des Grands Feux : Berger de Beauce exceptionnel.

Magicien : Surnom donné à Mr Orlandini par Bernard Aujolas.

Donner son sang : Formule qui s’adapte exclusivement à un étalon qualifié de grand traceur.

François Lelevier : Véritable figure cynophile, Maître dresseur & expert en tout point.

Jony du Comté de Ribeaupierre : Plus jeune chien de compétition à être en finale. Il sera sacré Champion de France en Ring, l’année suivante à Blagnac en 1976. 

J-M Vedrenne.
Team Chienplus.

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